Le douanier Rousseau aux galeries nationales du Grand Palais : Jungles à Paris.

Belle exposition, qui forcement m'a touché : le douanier Rousseau était un homme des bois... Comme moi ! Comme je suis assez occupé, je mets en ligne l'article de Cécile Brisson pour le Nouvel Observateur puisqu'il propose le principal. J'ajouterai ce qui me semble y manquer dès que j'en aurai le temps...

Paris-Jungles ou l'exposition Douanier Rousseau au Grand Palais par Cécile Brisson.

Une végétation luxuriante habitée de fauves affamés, d'oiseaux de paradis et de charmeurs de serpents. Les "jungles" du Douanier Rousseau sont exposées à partir de mercredi au Grand Palais, à Paris, la ville où elles ont été imaginées. Le peintre autodidacte, figure de proue de l'art du XXe siècle, n'a en effet jamais mis les pieds sous les tropiques.
Henri Rousseau (1844-1910) "avait un monde imaginaire extrêmement riche", souligne Claire Frèches-Thory, l'une des commissaires de l'exposition. "En fait, il n'a jamais quitté Paris et ses 'jungles' se nourrissent de ses promenades au Jardin des Plantes".
La cinquantaine de tableaux rassemblés au Grand Palais montre l'évolution du peintre jusqu'aux célèbres grands formats de la fin de sa carrière. Entre la Promenade dans la forêt (1886) et le Rendez-vous dans la forêt (1889), le feuillage des arbres s'épaissit. L'atmosphère étrange de ces deux toiles annonce l'onirisme des "jungles" dont la première, Surpris ! (ci-dessous), est peinte en 1891. Entre hautes herbes et feuillages bas, un tigre tapi montre ses dents.



Le visiteur découvre aussi des portraits et des allégories, qui n'ont pas toujours été très bien accueillies. D'après Le Petit Journal, la gloire d'Henri Rousseau était faite "de l'admiration de quelques-uns et de la moquerie de tout le monde".
Encore aujourd'hui, certaines toiles font sourire. Les Représentants des puissances étrangères venant saluer la République en signe de paix (1907) se tiennent droits comme des poteaux ; mêmes les enfants qui font la ronde autour d'une statue semblent figés, tout comme les drapeaux censés flotter au vent.
L'anatomie des personnages de l'Heureux Quatuor (1901) laisse songeur, notamment les bras raccourcis du joueur de flûte. Pourtant, dans Moi-même, portrait-paysage (1890), l'artiste s'est doté d'un corps correctement proportionné. "Dans ses portraits d'enfants, on a l'impression qu'il ne sait pas maîtriser la perspective", relève Claire Frèches-Thory. "En fait, il est tout à fait capable de le faire. Mais quelquefois, il ne le fait pas. Pourquoi? Ca reste un mystère. On a l'impression qu'il se moque un peu du monde".

Né à Laval, Henri Rousseau entre en 1871 à l'Octroi de Paris, service qui collecte une taxe municipale sur certaines marchandises, ce qui lui vaut son surnom de "douanier". Jusqu'à sa mort, il habite la capitale -à Montparnasse puis à Plaisance- et il la peint. Ce qui donne les petits formats de la région parisienne comme Vue des fortifications (1896), Vue du quai d'Ivry (1900), Allée du parc de Saint-Cloud (1908) et la charmante Scierie, environs de Paris (1893-95).
Puis il invente des paysages plus lointains. Les Expositions universelles l'inspirent, ainsi que les illustrations spectaculaires des journaux de la IIIe République. Le Douanier Rousseau aime aussi se promener au Jardin des Plantes. "Quand je pénètre dans ces serres et que je vois ces plantes étranges, il me semble que j'entre dans un rêve", confie-t-il. A la ménagerie, il observe les lions, les tigres et les panthères. Au Museum d'histoire naturelle, il voit les fauves naturalisés présentés en position de combat.
Dans ses "jungles", il réinterprète animaux et végétaux. "Il n'y a aucune plante qui est réelle", affirme Claire Frèches-Thory. "On a essayé de les identifier. Ca ne ressemble à rien".
L'exposition, la première depuis la rétrospective Douanier Rousseau qui s'était tenue en 1984-85 au Grand Palais, réunit une douzaine de ces "jungles", ses oeuvres les plus abouties.
Dans Le Rêve, au coeur d'une forêt luxuriante aux fleurs géantes, une femme nue est allongée sur un canapé Louis-Philippe en velours rouge en compagnie de bêtes sauvages hypnotisées par un charmeur de serpents. Les frontières entre l'étrange et le familier s'évanouissent. Après avoir vu ce tableau au Salon des Indépendants en 1910, Guillaume Apollinaire écrit: "Je crois que cette année, personne n'osera rire (...) Demandez aux peintres. Tous sont unanimes: ils admirent".

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