Après la mort de mon frère j'ai eu envie de travailler avec des cadavres. D'ailleurs, le premier cadavre avec lequel j'aurai aimé travailler c'était le sien, sans doute parce qu'il est parti à l'hôpital puis parti tout court la veille du jour où nous avions prévu de prendre son empreinte. D'ailleurs la toile coma, faite alors qu'il était encore dans le coma (d'où le nom), je l'avais préparée pour lui, mais à la base elle était prévue pour faire l'Echographie du pêcheur, avec un épervier et des petits poissons assiettes qu'on serait allés pêcher ensemble, tout ça tout ça...
La toile était à lui donc, mais comme il était dans le coma et qu'on se ressemblait quand même suffisamment pour qu'on sache qu'on était frères (surtout les yeux, merci papa merci maman !), j'ai posé à sa place pour la toile du coma.
Parce que je ne pense pas qu'on m'aurai autorisé à le couvrir de peinture sur son lit de réa avec des fils et des perfs branchés de partout... Et puis alors il était encore vivant, alors je me disais qu'une fois rétabli il pourrait me la faire, cette satanée Echographie du pêcheur ! Par contre quand il est mort ça a tout changé, mais à aucun moment je n'ai envisagé d'assouvir l'envie (pourtant intenable) de le couvrir de peinture alors qu'il était dans son cercueil, avec son épervier justement. Rien que l'idée de demander à mes parents "dites, je peux prendre son empreinte avant qu'ils ferment la boite ?!" et puis j'oubliais.
Alors quand Monsieur Danétis a demandé "Faites-moi des empreintes de ce que vous voulez, partes chercher quelque chose qui vous plait...", je me suis dit "Il faut que je trouve un pigeon mort, il faut que je trouve un pigeon mort". C'est devenu une question d'honneur pour moi de trouver cet oiseau... Et vous savez quoi, à chercher dans tous les fourrés, j'en ai trouvé un. En même temps ce n'était pas ce qu'il y de plus difficile, parce qu'à Saint Denis ce ne sont pas les pigeons qui manquent ! Alors un pigeon mort...

En tout cas, j'étais soulagé quand je l'ai trouvé et pour être franc j'étais content, et même fier à la limite. Je sais, ce n'est pas très normal, mais pour le coup c'était comme ça. Et des fois il faut savoir se contenter de peu (pourquoi des fois ?).
J'ai fait des empreintes bleues de ce pigeon partiellement décomposé sur un papier très fin. Aujourd'hui je les ai ressorties, retravaillées en bleu (les contours, comme d'habitude avec mes empreintes) et puis je les ai marouflées... Sur des toiles avec châssis s'il vous plait !
La première toile me plait bien, le marouflage a fait des plis sur le papier, ça donne un aspect ancien... Un fossile d'archéoptéryx !

Voilà, j'ai pris des empreintes d'un oiseau mort et je vais les appeler Pigeon vole !. Vous connaissez maintenant l'histoire. La deuxième de la série arrive demain.
1 De Marie -
C'est comme si tu lui avais rendu la vie dans l'azur.
2 De Jules -
Marie : c'est encore pire, c'est comme si je m'étais accordé de continuer la vie dans l'azur. Pour le frangibus il n'y a malheureusement plus rien à faire, c'est moi que j'essaie de sauver... Paix à nos âmes, mouarf arf arf !