Une amibe me regarde par le trou de la serrure...


Et son œil est perçant comme œil humain ne peut, Et son œil est perçant comme œil humain ne peut...

Il raccroche, après m'avoir dit combien il était important qu'il explique à ma mère ce qui allait se passer dans quinze jours. Je lui répond qu'elle est infirmière et qu'elle connait les priorités des chirurgiens. C'est vrai, le rendez-vous de vendredi a été annulé parce qu'il a passé toute une après-midi les mains dans le sang d'un homme qui pourra désormais prétendre (à moins d'un quelconque imprévu) vivre dix ans de plus.
Et celui d'aujourd'hui aura lieu parce que "l'urgence est morte" dans l'ambulance. C'est la vie. Par ce concours de circonstances malheureux pour les uns et heureux pour les autres, il pourra expliquer à môman comment il risque de lui enlever un demi-poumons pour les clopes qu'elle grille aujourd'hui encore, stressée de la vie de merde qu'elle traine depuis la mort de son fils ; et combien ça lui sera égale parce qu'elle a des poumons de bébés (... ?). Est-ce de la chance, ou bien l'avantage de vivre dans l'air pur du pays qui a grillé son deuxième môme ? Y a-t-il problème ? Sûrement pas. Chacun sa chance et pas de moment pour ça. Chacun sa chance et pas de moment pour ça. "Alors prends-la" dit la petite voix.

J'appelle môman sur son fichu portable qu'elle ne saura jamais utiliser (grand bien lui en fasse). Au quatrième appel j'arrive à lui dire "Il t'attend ! Il T'ATTEND !!!!" avant qu'elle ne raccroche. Elle me répond "Je sais j'y vais, j'y cours, j'y vais j'y couuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuurs !" avec un éclat de rire comme une volée de moineaux dans un champs de blé. Et j'entends ses talons claquer. Elle court, vraiment ! Je ris aussi et les notes qui sortent de ma bouchent sont aussi légères que sa volée de moineaux mais dans mon champs de blé, parce que ses talons claquent comme un coeur vivant.
Parce que ses talons claquent comme un coeur vivant.
Devant le monstre menaçant je ris comme une volée de moineaux au dessus de mon champ de blé, et tant que je le pourrai j'en rirai encore. Et j'emmerde profondément ceux qui ne savent pas rire. "Et emmerde profondément ceux qui ne savent pas rire !" dit la petite voix.

" Si mes poumons sont malades, ce n'est pas par hasard : quand ton frère est mort j'ai dit que je ne pourrai pas vivre sans avoir souffert au moins autant que lui". Je la regarde, garde mes questions d'échelles. Je la regarde et garde mes questions d'échelles... Mais qui pense à ces six wayanas -dont deux gamines aux sourires éclatants- qui sont mort dans un avion surinamais ? Pourquoi un village en deuil quand chez nous le mort sépare ?  Qu'est-ce qui met le village en deuil, qu'est-ce qui nous sépare ?  Que l'amibe par son trou chuchotte et rassure : " La justice n'existe pas dans la mort, mais je t'assure : l'injustice non plus ". Et l'amibe me regarde quand je dors, elle me dit :" Chacun sa chance et pas de moment pour ça, alors prends-la ! Et emmerde ceux qui ne savent pas rire : Bouffe la neige, bouffe la terre, bouffe la Terre. Sarco-phage réveille-toi et réveille tes armées !

Sarko-phage réveille-toi et réveille tes armées ! "

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